Exploitation des fonds marins : les îles Cook vont-elles collaborer avec la Chine ?

[pompé sur franceinfo]

Exploitation des fonds marins : les îles Cook vont-elles collaborer avec la Chine ?

Archives. Recherche sous-marine avec le robot Victor de l’Ifremer.
Tandis qu’en Polynésie Winiki Sage, président de la FAPE, redoute l’exploitation des fonds marins, les îles Cook ont entamé des discussions avec la Chine concernant “l’exploration” de ses ressources minières. Elles envisagent depuis quelque temps déjà l’exploitation minière de ses fonds marins, qui représenteraient une manne financière, un moyen de réduire sa dépendance aux combustibles fossiles et de s’armer contre le réchauffement climatique.

Tout porte à croire que les îles Cook pourraient dire oui à l’exploitation des fonds marins. Pour l’instant, cette petite nation autonome du Pacifique de 17 000 habitants, ancienne colonie de la Nouvelle-Zélande, en est seulement à l’exploration. Elle a accordé une licence à trois entreprises pour rechercher des nodules riches en métaux tels que le nickel et le cobalt, qui sont utilisés dans les batteries des voitures électriques.

Une manne financière pour les petits pays et géostratégique pour la Chine

Ces conversations ont ouvert la porte à de nouveaux domaines de collaboration,” a indiqué le Premier ministre de l’archipel Mark Brown, qui a effectué une visite à Pékin. Le dirigeant, également en charge du portefeuille des minéraux des fonds marins a mis en avant le fait que ce secteur pourrait rapporter plusieurs milliards de dollars et serait un moyen de se protéger contre le changement climatique “grâce à tous les revenus que nous pouvons obtenir“. Les îles Cook travaillent sur la question depuis des décennies. Elles organisaient justement la 52ème conférence sur les minéraux sous-marins en septembre dernier.

Forcément, ces minéraux attisent les convoitises, en particulier des grandes nations. Avec en tête, la Chine qui s’intéresse à ces richesses depuis les années 1980 et souhaite en faire une industrie. D’autant que la Chine cherche à étendre son influence diplomatique, économique et militaire dans la région stratégique du Pacifique, défiant l’influence historique des Etats-Unis, de la Nouvelle-Zélande et de l’Australie… En décembre, les îles Cook ont accueilli le vice-ministre chinois des Affaires étrangères, Ma Zhaozu, pour discuter du renforcement des liens dans des domaines tels que le développement économique, la santé, l’éducation et la réponse au changement climatique. Les îles Cook disposent d’une vaste Zone économique exclusive (ZEE) dans le Pacifique Sud et sont liées par un accord de “libre association” à la Nouvelle-Zélande, qui leur apporte un soutien budgétaire et une assistance en matière d’affaires étrangères et de défense. Ses habitants jouissent de la citoyenneté néo-zélandaise.

La Nouvelle-Zélande avait justement exprimé la semaine dernière sa “vive préoccupation” concernant un accord de coopération négocié avec la Chine, dont les détails n’ont pas été publiés. En parallèle, Aotearea envisage de retirer son soutien à une interdiction internationale de l’exploitation minière des fonds marins, tel que l’a déclaré mardi à l’AFP le ministre des Ressources du pays, y voyant une manne financière pour la Nouvelle-Zélande. Ce pays est pourtant cité comme exemple en ce qui concerne la défense de l’environnement.

Les points de vue divergent en Polynésie

L’enjeu est crucial pour l’ensemble du Pacifique. Car l’exploitation des fonds marins dans un seul des pays de la zone pourrait impacter tous les autres. On ne connaît pas encore les conséquences qui pourraient survenir après avoir creusé au fond de l’Océan. Et c’est tout le problème. Les associations de protection de la nature et les scientifiques craignent que cette pratique ne détruise les écosystèmes marins, qui jouent un rôle crucial pour réguler le climat, et certaines nations ont demandé son interdiction.

Imaginez quand l’Homme va commencer à aller creuser à 4000 mètres de fond, on ne sera pas là pour voir ce qui se passe avec les impacts qui peuvent être terribles.

Winiki Sage, président de la FAPE en Polynésie

Winiki Sage, le président la fédération des associations de protection de l’environnement s’est positionné sur notre plateau en défaveur de ces exploitations. “Tout ce qui est extraction des fonds marins c’est quelque chose que l’on redoute, quand on voit comment on a traité les mines sur terre. (…) Les îles Cook sont prêtes à le faire ; il y aura un impact aussi sur notre Pays ! C’est ça qui est gravea-t-il alerté.

Les positions divergent au niveau local, même si un moratoire sur l’exploitation minière des grands fonds marins a été voté à l’Assemblée en 2022. Moetai Brotherson ainsi que l’État sont favorables aux recherches mais pas à l’exploitation. Mais Oscar Temaru, président du Tavini, a réitéré son souhait d’exploiter les fonds marins pour y extraire les nodules polymétalliques. “[Nous sommes] un pays très très riche. Et c’est à la jeunesse de faire un choixavait lancé le leader indépendantiste.

Un code minier devrait voir le jour courant 2025

Pour l’instant, aucun code minier n’existe. Depuis dix ans, l’Autorité internationale des fonds marins (AIFM) négocie pour fixer les règles d’une éventuelle exploitation de ces grands fonds marins classés “patrimoine commun de l’humanité”.

En attendant, l’AIFM a autorisé uniquement des explorations. Les recherches se poursuivent dans les fonds marins pour établir une réglementation qui corresponde à la réalité et aux enjeux. Elle devrait voir le jour courant 2025.

Mais en l’absence de code minier, les pays favorables aux extractions minières pourraient enclencher le pas. Nauru, île détruite par une surexploitation de phosphate, a affiché en juillet 2024 sa volonté de déposer un contrat d’exploitation par une entreprise canadienne avec comme objectif une mise en œuvre en 2026. Cette même entreprise a annoncé en août 2024 le lancement d’un projet d’exploitation minière en eaux profondes dans le Pacifique sud en 2026, par l’intermédiaire d’une filiale soutenue par Nauru. Selon l’AFP, la société espère ouvrir une vaste zone économique offshore pour recueillir dans les fonds marins des roches polymétalliques. Les Tonga militent également en faveur de l’extraction, tandis que les Palaos, les Samoa et les Fidji s’y opposent fermement.

Un forum des îles du Pacifique sur les minéraux sous-marins est prévu du 17 au 21 février 2025.

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