Le plus grand parc de stockage d’électricité s’installe à Cheviré

[pompé sur nantes.port.fr]

La filiale française de la société britannique Harmony Energy a choisi la zone portuaire de Cheviré pour implanter son futur parc de batteries bénéficiant de la technologie TeslaMegapack d’une puissance de 100 MW, stockant une énergie de 200 MWh. Il s’agira du plus grand parc de stockage d’électricité par batteries en France.

« Le parc sera en mesure de soutirer et restituer l’équivalent de 2 heures d’électricité pour alimenter 170 000 foyers. Ce seront les premières batteries d’une telle capacité jamais installées en France” précise Harmony Energy.
Les travaux ont débuté cet été. La mise en service est attendue à l’hiver 2025.

«La transition énergétique est une réalité pour Nantes Saint-Nazaire Port. Elle s’illustre à travers l’accueil des filières comme celles des énergies marines renouvelables ou encore de l’hydrogène. Accélérer cette transition pour faire face aux défis climatiques et énergétiques passe également par l’expérimentation de solutions énergétiques innovantes sur le domaine portuaire. Nous sommes heureux d’ajouter une nouvelle pierre à cet édifice avec l’accueil, sur le site portuaire de Cheviré, de l’un des leaders en Europe dans le stockage d’énergie, Harmony Energy, et l’implantation du plus grand parc de stockage d’électricité par batteries en France», se félicite Jean-Rémy Villageois, Président du Directoire de Nantes Saint-Nazaire Port.

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Bordeaux : Surcoût, calendrier, environnement… Où en est le projet de méga usine pour batteries EMME ?

Une nouvelle phase de concertation, qui durera jusqu’au 15 mai, démarre pour le projet « EMME », qui prévoit d’installer près de Bordeaux une usine de traitement du nickel et du cobalt en bord de Garonne, pour un investissement total de 540 millions.

Une nouvelle phase de concertation avec le public, placée cette fois-ci sous l’égide de la CNDP (Commission nationale du débat public), vient de démarrer concernant le projet contesté d’implantation de l’usine EMME près de Bordeaux, en bord de Garonne.

Les porteurs du projet EMME, pour « Electro Mobility Materials Europe », souhaitent installer d’ici à 2028 sur le site portuaire de Grattequina, à cheval sur les communes de Blanquefort et Parempuyre, une usine de transformation de nickel et de cobalt pour les batteries des voitures électriques et hybrides. Le président de EMME, Antonin Beurrier, était cette semaine à Bordeaux pour défendre l’implantation de cette usine sur ce site, alors que des habitants de communes voisines s’y opposent, craignant des risques environnementaux.

pole-industriel-en-bord-de-garonneCe pôle industriel en bord de Garonne prévoit d’accueillir un procédé de transformation du nickel et du cobalt, pour les batteries des véhicules électriques. - JDS Architectes

C’est quoi au juste une usine de transformation de nickel et de cobalt ?

Le nickel et le cobalt sont des matériaux utilisés dans les cathodes des batteries lithium-ion des véhicules électriques et hybrides. La masse de nickel contenu dans ces véhicules varie de 40 à 120 kg. Mais pour être utilisés dans les batteries, ces matériaux doivent être transformés d’un état métallique à un état chimique. C’est ce à quoi doit servir l’usine EMME, qui sera capable de traiter 20.000 tonnes de nickel et 3.000 tonnes de cobalt par an, pour en sortir 89.000 tonnes de sulfate de nickel et 9.000 tonnes de sulfate de cobalt par an. « Nous convertissons sous forme de sels les produits qui arrivent chez nous déjà raffinés », résume Antonin Beurrier.

D’où viennent le nickel et le cobalt, et comment seront-ils acheminés ?

Les principales mines de nickel dans le monde se trouvent en Nouvelle-Calédonie, Amérique du Sud et Indonésie. Pour le cobalt, elles se situent au Congo, Australie et Indonésie.

« D’ordinaire le transport routier [en bout de chaine] est plus économique, avance Antonin Beurrier, mais dans notre cas l’acheminement terrestre ne serait pas compétitif, même s’il y a un nœud : la matière arrive de loin, par bateau, et Bordeaux n’est pas situé sur les lignes directes de transport maritime international. Cela aura donc un coût de faire transiter la marchandise par Rotterdam ou Le Havre, avant de la faire venir ici. Mais ce ne sera pas un surcoût important, et surtout c’est l’empreinte carbone la plus réduite. L’économie est donc largement positive. »

Même le transport des matériaux pour la construction du site devrait se faire majoritairement par voie maritime. Quelque 145 modules préconstruits doivent notamment être acheminés par bateau, sur une durée de huit mois.

Lorsque l’usine tournera à plein régime, « nous aurons des volumes importants à transporter, donc le choix d’être en bord de Garonne est essentiel et inhérent au site lui-même », insiste de son côté Sylvie Dubois-Decool, directrice générale. « En revanche, en bord de fleuve, il faut se protéger du risque inondation, sans créer de problèmes à nos voisins », ajoute Antonin Beurrier.

Est-ce dangereux ?

L’usine, si elle se réalisait, serait classée Seveso seuil haut en raison « de risques environnementaux pour le milieu aquatique en cas d’accident ». Un collectif, Alerte Seveso Bordeaux Métropole, estime que « le risque de contamination des sols et des eaux par l’usine est extrêmement élevé avec des conséquences potentiellement graves et persistantes pour la santé humaine et la biodiversité ». Un des représentants du collectif, Jean-Marc Farthouat, indique avoir « peur, notamment en raison de la quantité de produits dangereux, et inflammables, stockés sur ce site ». Le stockage des produits en containers atteindrait par ailleurs « une hauteur de dix mètres » s’indigne cet habitant de Parempuyre. « Cela, on ne vous le montre pas sur les belles images de synthèse du dossier… »

Quel serait le risque de fuite dans la Garonne ? Dans les éléments communiqués dans le dossier de concertation, l’industriel explique que « les produits sont conditionnés dans des big bags étanches, eux-mêmes conditionnés dans des containers scellés, et la matière première est très peu soluble dans l’eau ». Et durant le processus de fabrication du sulfate de cobalt et de nickel, « il n’y a aucune possibilité de fuites car ils sont produits en circuit fermé ».

Le risque inondation est également pointé du doigt. L’association martèle qu’il est « aberrant » de prévoir une usine Seveso en zone inondable. « Comment est-il possible d’imaginer rendre cette zone compatible pour autoriser l’implantation d’une usine Seveso à haut risque en zone agricole, non seulement inondable mais aussi soumise aux risques de submersion par la Garonne ? »

Les éléments du dossier assurent que ce risque est aussi pris en compte. « L’événement retenu pour les modélisations du projet est celui de la tempête de 1999 avec une rehausse du niveau de la mer d’1,20 mètre au niveau du Verdon [correspondant aussi au scénario le plus pessimiste du Giec, avec un réchauffement mondial de + 4,4 °C à horizon 2100]. » Le remblai de l’usine a ainsi « été dimensionné pour une hauteur minimale de 5,50 mètres afin de protéger le site ». « Le risque est surtout que cette quantité énorme de remblai vienne écraser le sol et freiner l’arrivée des eaux souterraines, avec des répercussions sur la montée des nappes phréatiques à Parempuyre », s’inquiète de son côté Jean-Marc Farthouat.

Quel est le coût du projet ?

Le programme est désormais chiffré à 540 millions d’euros, puisqu’il intègre 40 millions d’euros de surcoût : « 20 millions d’euros en raison du décalage du projet de six à huit mois après les nouvelles phases de concertation, et 20 millions d’euros en raison du redimensionnement du projet » pour réduire son imperméabilisation. « Les investissements de base – pour les bâtiments, les machines… – atteignent désormais 340 millions d’euros avec ces surcoûts, détaille Antonin Beurrier. Les études d’ingénierie, les simulations, les tests, avoisinent les 100 millions d’euros. Puis il y a les frais de mise en service (constitution de stocks, recrutement…) qui atteignent là aussi les 100 millions d’euros. »

Quelles retombées pour la région ?

Les porteurs du projet indiquent qu’ils veulent s’inscrire dans un « écosystème » regroupant 85 acteurs de la filière batterie en Nouvelle-Aquitaine. « Nous ferons travailler des sous-traitants, et nous espérons vendre nos produits à des clients comme SAFT. » Le site devrait par ailleurs employer environ 200 personnes, et générerait 300 emplois indirects.

Antonin Beurrier souligne également que cette usine répondrait à des enjeux de décarbonation, sachant que « la production de véhicules électriques dépend fortement de matières premières raffinées en Chine, où les processus sont associés à de fortes émissions de CO2 ». Le projet EMME permettrait ainsi d’économiser « 1,6 million de tonnes de CO2 par an ». « C’est tout simplement le plus grand projet de décarbonation de toute la région », selon le PDG.

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Niort : « L’action directe continuera tant que je vivrai… »

[pompé sur Attaque]

Libération / mardi 8 avril 2025

Depuis septembre, un étrange phénomène frappe les rues de la préfecture des Deux-Sèvres : une fois par mois environ, un véhicule sorti des usines d’Elon Musk prend feu. «Libé» a suivi les traces du pyromane, jusqu’à le débusquer [c-à-d : une écrivaillonne de Libé a posté une annonce sur Indy Nantes et les compas ont bien voulu lui répondre ; NdAtt.].

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L’épaisse fumée de la cigarette électronique d’Ivana s’écrase contre la vitre de sa Tesla. «Pour la garer, maintenant, je choisis un lieu où il y a du passage et des caméras», explique la vingtenaire. A Niort (Deux-Sèvres), où cette commerciale travaille, un étrange phénomène court les rues depuis septembre. Au moins une fois par mois, quelque part en ville, une voiture de la célèbre marque américaine prend feu au cœur de la nuit. Sorte de roulette russe du pneu cramé. De jeu des Loups-Garous version bagnole calcinée. Rien que sur le parking où son véhicule électrique fait le plein, les flammes ont sévi en octobre et aucun conducteur ne prend depuis le risque de s’absenter le temps de la recharge. La jeune femme enrage : «C’est honteux, on crame pas des voitures pour des opinions politiques, tout comme on n’achète pas une Tesla pour Elon Musk.»

Forcément, face à ces feux en série, l’hypothèse d’une action anti-Musk est la première envisagée. Manifestations , véhicules rayés, incendies de concessions… Ces derniers temps, les dégradations à l’égard de la marque du milliardaire s’accumulent au fil des frasques de son grand patron. Notamment depuis le salut nazi du bras droit de Trump en janvier. Les soutiens à l’extrême droite et les coupes franches dans les administrations américaines sont d’ailleurs l’une des explications de la chute des ventes de Tesla de 13 % au premier trimestre 2025 par rapport à la même période l’an dernier et l’effondrement de l’action de la marque d’Austin de plus de la moitié depuis le record du 17 décembre 2024. Mais dans le cas de Niort, le doute plane encore : l’homme le plus riche du monde est-il la cible du coupable, toujours recherché ?

Pour commencer, les dates ne coïncident pas : les premiers incendies ont eu lieu bien avant le geste polémique du big boss. Ensuite, outre la dizaine de Tesla cramée, au moins deux véhicules de luxe ont aussi été visés. Une Porsche et une Aston Martin. Dans les rues beiges de la ville, des traces noirâtres se mêlent désormais au décor. Ici sur des branches carbonisées, là sur une palissade autrefois immaculée. Ces traces, Libé les a suivies, et a remonté la piste de l’incendiaire en série de Niort.

La poisse de Stéphan

En ce moment, pas mal de monde charrie Stéphan. Les collègues, déjà. «Ils m’ont demandé si j’avais essayé de faire un barbecue»,raconte ce commercial du BTP, par ailleurs végétarien. Et les pompiers, aussi. «Encore vous ?» lui lancent-ils goguenards, le 10 mars. Les hommes du feu éteignent alors pour la deuxième fois en quelques mois un incendie en bas de chez lui, route d’Aiffres. Des flammes qui, de nouveau, réduisent en cendres une Tesla blanche, son véhicule de fonction.

La première fois, c’était le 15 septembre. «Mes voisins avaient entendu du bruit et des voix, mais j’ai d’abord cru que c’était accidentel», rapporte le quadra à fines lunettes. A la deuxième Tesla HS, le doute se dissipe. Cette nuit-là, les policiers rappliquent, très agacés. Vingt minutes plus tôt, leur patrouille est passée devant l’allée du Niortais sans rien observer d’anormal. «Ça fait un certain tempsqu’on surveille toutes les Tesla », lui expliquent les agents.

A ce moment-là, cela fait aussi un certain temps qu’ils cherchent le coupable. Depuis septembre, une enquête est ouverte au chef de «destruction volontaire par incendie» par le parquet de Niort. Mais pour l’heure, le serial incendiaire ne cesse de s’évaporer. Sans jamais laisser sur les lieux un indice sur ses motivations. Depuis son salon, Stéphan a vue sur la place de parking encore carbonisée. Regard mélancolique devant un buisson lui aussi touché : «Les feuilles cachaient la route l’été… C’est dommage.» A ses pieds, son chien, un shih tzu aux poils emmêlés, soupire de concert.

Le zen de Didier

Bermuda, gambettes bronzées et bracelets perlés façon surfeur, Didier vit à quelques mètres de Stéphan, dans un quartier tranquille du boulevard Charles-Baudelaire. Le quinqua se décrit comme «le sixième de la bande». Comprendre : le sixième à avoir vu sa Tesla finir au bûcher, le 18 novembre. Lorsque les pompiers sont arrivés cette nuit-là, le propriétaire les a médusés. Le feu a pris devant sa palissade, juste à côté d’un autre de ses véhicules : son précieux combi Volkswagen. La portière droite de ce dernier commençait à flamber, mais qu’importe. Didier est monté à bord, l’a démarré et déplacé. Son voisin, Stéphan, en pouffe encore : «Je crois qu’il s’est fait un peu fait gronder.»

Didier n’a jamais envisagé la possibilité d’une action anti-Musk. Le Niortais n’en a d’ailleurs pas grand-chose à faire de ce milliardaire. Au chômage lorsque le feu a pris, il a acheté sa Model 3 à 40 000 euros en 2023 dans l’espoir de la revendre un an plus tard. Idéalement, un peu plus chère. «Le problème, c’est qu’Elon Muska décidé de baisser le prix du neuf », regrette-t-il. L’autre souci, c’est qu’il ne reste aujourd’hui de l’automobile plus que le coffre. Et les 35 000 euros que l’assurance a bien voulu lui reverser.

Pour démasquer le coupable, le quinquagénaire a vérifié la caméra de son jardin. Mais sur les images, personne. Seule «une boule de feu»scintille. Avec le recul, Didier préfère en rire : «J’aimais bien ma Tesla, c’était une voiture de feignant, avec une seule pédale.»On lui demande dans quoi il roule maintenant. Moue déçue d’un enfant : «Une Renault Zoe.»

La galère de Simon

«Votre pneu avant droit est dégonflé.» Simon a reçu cette notification à 2h18, le 15 octobre, alors que sa voiture se consumait entièrement. Lui aussi a perdu sa Tesla à côté de chez lui, avenue de Limoges. Le genre de voie sur laquelle les voitures rasent les maisons toute la journée. «Un policier m’a dit qu’une canette de Schweppes remplie d’essence avait été retrouvée dans un buisson près d’un autre incendie. Mais depuis, je n’ai plus de nouvelle», rapporte l’homme de 24 ans.

Alternant en cybersécurité, Simon faisait le trajet Niort-Nantes pour travailler. 1 h 40 aller, 1 h 40 retour. Après l’incendie, l’étudiant aux bouclettes blondes a dû se débrouiller, entre véhicule de prêt et covoiturage. «J’ai fini par me dire que j’allais être viré», se rappelle-t-il. Finalement, une solution est trouvée : les jours où Simon n’a pas de voiture, il se rend en train au siège de sa boîte… à Paris. Trois fois plus loin que Nantes, mais plus accessible depuis Niort. «J’ai tenté un nombre incalculable de fois de demander un geste à Tesla, on m’a envoyé balader», regrette-t-il avec amertume. Libé, qui a aussi contacté l’entreprise pour des renseignements, n’a pas eu beaucoup plus de chance.

Qui a fait le coup ? Le rapport d’expertise a seulement permis de conclure que le feu était parti du coin avant droit de sa voiture. Pendant un temps, le jeune homme a eu l’espoir de résoudre le mystère grâce au mode Sentinelle, une fonctionnalité filmant les abords de sa Tesla. Mais la clé USB stockant les images a elle aussi été détruite par les flammes. Désormais, Simon ne dispose que d’un seul et maigre indice : une tentative d’ouverture de sa poignée de portière, enregistrée par le véhicule à 2 h 16.

Le blues de Christian

Les fleurs de sa boutique respirent la joie de vivre. Mais le regard de Christian se perd dans le vide. Le chef d’entreprise de 47 ans ne se remet pas de la perte de sa voiture, survenue le 22 octobre. Sans cesse, il se repasse le film. L’anniversaire de sa femme dans un bon resto, le choix d’y aller avec son véhicule fétiche et celui enfin de le « faire dormir» une fois, «juste une fois», dans la rue. La fois de trop : son Aston Martin aussi a goûté aux flammes. «Je ne suis pas millionnaire, j’ai acheté cette voiture pour 55 000 euros. C’était le fruit du travail et de sacrifices. J’en rêvais et j’avais la ferme intention de vieillir avec», raconte-t-il, la gorge nouée.

C’est le klaxon devenu fou de son véhicule qui l’a réveillé ce soir-là. En chaussettes, le quadra s’est précipité dans la rue : comme celle de Simon, sa voiture était garée avenue de Limoges. Et comme celle de l’étudiant, les flammes s’étaient déclenchées du côté avant droit de l’engin. L’expertise a confirmé que l’incendie était volontaire. «Cette voiture avait un dessin superbe. Quand j’avais un coup de mou, j’allais faire un tour avec et ça allait mieux. Quand je la voyais, j’avais toujours ce petit coup de cœur, celui de l’amoureux», s’émeut Christian. Dans ses yeux, une lueur brille. Avant de s’éteindre aussitôt : «Qu’est-ce que j’ai fait de mal à ceux qui l’ont brûlée ?»

La colère de l’incendiaire

En octobre et novembre, deux feux de Tesla ont frappé le parking de la gare de Niort. Des restes d’aluminium cramé jonchent encore le sol. Le 28 novembre, un véhicule s’est embrasé avenue Léo-Lagrange. L’un des volets de la maison du propriétaire, noirci et gondolé par les flammes, demeure baissé. Dernièrement, le serial brûleur a élargi sa zone d’action à Chauray, à environ 12 km de Niort. Deux Tesla appartenant à une mutuelle sont entrées en combustion, le 18 mars. Le maire Claude Boisson (sans étiquette) s’étonne : «On est une ville très calme, ici les véhicules ne brûlent pas. Ou s’ils brûlent, c’est pour une histoire de court-circuit.»

Le même jour que ce feu, une publication intrigante est apparue sur Internet. Sur le site militant de Nantes Indymedia [ou ici ; NdAtt.], un article signé par «des anarchistes» relate : «Afin de bousculer le quotidien de petits-bourgeois, ou du moins, d’individus se comportant comme tels, quinze de leurs voitures ont été incendiées dans la région de Niort.» Des feux non accidentels, insistent-ils, sans pour autant les revendiquer.

Libé a tenté de contacter l’auteur. Et a un jour reçu un mail anonyme : «Nos échanges se feront uniquement via chiffrement.» Condition acceptée. «Je suis un des militants à l’origine de ces actions», se présente l’internaute. En guise de preuve, il nous fournit une liste des adresses précises de certains feux. Ainsi que des plaques d’immatriculation concernées. On l’interroge sur ses motivations. D’emblée, il éclaire : «Le salut nazi d’Elon Musk n’a pas été le déclencheur.» Même si le geste a, concède-t-il, «renforcé la cause anticapitaliste et antifasciste, en établissant publiquement un lien évident entre le capitalisme et la montée de l’extrême droite, notamment du nazisme».

D’après notre interlocuteur, les militants ont voulu viser «la bourgeoisie». «Parce qu’il est indécent et provocateur que certaines personnes se permettent d’acheter et de parader dans la rue avec des véhicules de luxe […] alors que d’autres survivent à peine», s’indigne-t-il. Pourquoi avoir surtout visé les Tesla ? Car c’est «un Big Brother sur roues, et dans une société dans laquelle la technologie prend une place croissante au détriment des libertés et de l’environnement, il est plus que nécessaire d’agir». La façon dont ils mènent leur combat, admet-il, a peu de chance d’être «audible par les propriétaires des voitures incendiées» . Toutefois, il continuera. Dans un dernier échange, on lui demande s’il compte ressortir le briquet bientôt : «L’action directe continuera tant que je vivrai, sous différentes formes et à différents endroits.»

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St Yrieix la Perche – Nouvelle manifestation contre les mines d’or

[pompé sur stopmines87]

Samedi 19 avril 2025, plus de 350 personnes se sont rassemblées à St Yrieix La Perche, au sud de la Haute-Vienne pour dire non aux mines d’or, ni ici, ni ailleurs. Pour elles, les mines, c’est de la pollution de l’eau et de l’air, des nuisances sonores. Le profil pour quelque uns et la « merde » pour les riverains, comme l’a très bien exprimé Patrick Blondy, pomiculteur à Coussac-Bonneval.
Ce cortège bigarré, hétéroclite se voulait totalement apolitique. Des agriculteurs et agricultrices de la Confédération paysanne et de la FNSEA, la députée LFI Manon Meunier, le maire de Chateau Chervix Jean-Paul Lachaud (sans étiquette), , des professionnels du tourisme… Des personnes de tout âge, de toute sensibilité… car la question des mines d’or concerne tout le monde.

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Appel à une grande manifestation en Ariège pour dire Stop aux nouveaux projets miniers

[pompé sur stopminesalau]

Après la mise en échec d’un premier permis de recherches minières pour la réouverture de la mine de Salau, une nouvelle demande de permis a été déposée. Toujours aussi toxique, le projet de Néometal concerne cette fois-ci les communes d’Ustou, d’Aulus, d’Auzat et de Couflens-Salau. Il prévoit aussi une usine de traitement du minerai à Saint-Girons. Ce projet mortifère ne doit pas voir le jour !
À Salau et à Eylie 900.000 m3 de résidus miniers empoisonnent déjà les sols et les eaux : amiante, arsenic, cadmium, plomb et autres métaux lourds. Il n’y a aucune illusion possible : la réouverture des
mines, c’est toujours plus de déchets toxiques ingérables et une pollution des eaux systématique.
Cette fois-ci l’extraction de l’or, convoité, va nécessiter un traitement au cyanure, peu recommandé par les agences de santé et très nocif pour l’environnement. Les tenants du projet parlent d’une « mine propre et responsable ». Que de mensonges : la mine propre n’existe pas ! On ne fera pas disparaître par enchantement les déchets miniers et la pollution des cours d’eau. Faut-il aussi citer les norias de camions chargés de minerais, circulant sur les routes de montagne traversant les villages et des sites naturels ?
Dans la mine de Salau, la présence d’amiante et les maladies mortelles des derniers mineurs sont clairement documentées, malgré le déni des tenants du projet. Aucune technique moderne n’évitera ces graves risques pour la santé des ouvriers et des riverains. Du temps de son fonctionnement, la mine de Salau a créé des emplois, d’où la nostalgie de certains pour cette époque. Mais aujourd’hui, que valent quelques emplois temporaires créés au milieu des machines automatiques face à l’empoisonnement irréversible du territoire et des populations ?
La ruée minière d’aujourd’hui se fait au nom de la « transition écologique », de la numérisation totale de la société et du réarmement des États. Contrairement aux arguments avancés, ce n’est pas en creusant ici que l’on empêchera la barbarie minière dans d’autres régions du monde. C’est la folie extractiviste et coloniale du capitalisme que l’on doit combattre.

Ne les laissons pas faire !
Aucun nouveau minerai ne doit sortir de terre, ni en Ariège, ni ailleurs !

Grande Manifestation le 24 mai – 14h30, allées de Villote, Foix

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18 terrains de foot par jour : nos voitures électriques détruisent la forêt

[pompé sur reporterre.net]

Rouler à l’électrique accélère la déforestation. C’est la conclusion inquiétante d’une nouvelle étude, publiée le 7 mai par les ONG Fern et Rainforest Foundation Norway. « La future demande européenne en matière de véhicules électriques pourrait faire payer un lourd tribut aux forêts mondiales et aux peuples autochtones », alertent les ONG, alors que les pays de l’OCDE planchent sur un approvisionnement « responsable » en minerais.

D’après ce rapport, la poursuite de nos usages actuels, qui s’appuient sur des batteries composées principalement de minerais extraits des sols forestiers, entraînerait la destruction de 118 000 hectares de forêts. Soit l’équivalent de 18 terrains de football par jour au cours des vingt-cinq prochaines années, rien que pour satisfaire la demande européenne.

« La consommation en métaux des Européens génère des massacres »

Les batteries représentent environ 70 % de l’empreinte de déforestation des véhicules électriques. Comme Reporterre le révélait en 2023, même le cobalt dit « responsable » est extrait dans des conditions sociales et écologiques désastreuses. « La consommation en métaux des Européens génère des massacres », dénonçait également sur notre site l’association Génération Lumière.

Pour éviter ce désastre, les chercheurs de l’association négaWatt et de l’université de Vienne — qui ont rédigé l’étude — proposent un scénario alternatif, qui permettrait de réduire la déforestation prévue de 82 %. Celui-ci repose sur le passage à des batteries plus innovantes, qui utilisent du fer et du phosphate plutôt que du nickel et du cobalt, vecteurs de déforestation.

Il se base également sur des politiques de sobriété. « Cela veut dire promouvoir des voitures plus petites, encourager le covoiturage, réduire la demande de déplacements, ou encore diminuer la dépendance à l’égard de la voiture, en particulier grâce à une mobilité plus partagée », précise Adrien Toledano, coauteur de l’étude pour négaWatt, dans un communiqué.

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Le tracé de la RD301 va-t-il être modifié à Saint-Victor? Une consultation publique bientôt lancée

[pompé sur rjfm.net]

Le Conseil départemental de l’Allier va lancer une consultation publique à Saint-Victor le 19 mai,  Elle porte sur un projet de modification du tracé de la Route départementale 301, c’est l’axe qui longe l’usine Dunlop, et qui rejoint Vaux.

Une modification sollicitée par Imerys, dans le cadre de son projet Emili de transformation du lithium, zone de la Loue.Il nécessiterait en fait la création d’un embranchement ferroviaire afin d’acheminer la matière première. Le dévoiement de l’axe routier permettrait ainsi d’éviter le franchissement du faisceau ferroviaire. Et donc de renforcer la sécurité des automobilistes.

Les usagers et habitants pourront s’informer et donner leur avis sur les détails de ce projet à la mairie de Saint-Victor, à la cité administrative de Montluçon, en en ligne sur www.allier.fr. La consultation publique doit durer jusqu’au 13 juin.

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Écologie radicale : 49 grands chantiers « susceptibles de s’embraser » surveillés de près par les renseignements

[pompé sur marianne.net]

Ce vendredi 2 mai, « Le Figaro » a dévoilé une liste de 49 grands projets qui seraient surveillés par la Direction nationale du renseignement territorial. Extraction de minerais, infrastructures de transports, enfouissement des déchets… Selon le quotidien, ces chantiers seraient dans le viseur de « saboteurs » issus de la mouvance écologiste radicale.

Va-t-on vers de nouveaux « Sainte-Soline » – commune des Deux-Sèvres qui avait été le théâtre il y a deux ans de violents affrontements entre militants écologistes et forces de l’ordre autour du projet contesté de mégabassines – partout en France ? Le Figaro révèle ce vendredi 2 mai le dernier état des lieux en date du 18 avril de la Direction nationale du renseignement territorial (DNRT). Le service de renseignement français identifie ainsi 49 sites « susceptibles de s’embraser à travers toute la France ». Extraction de minerais, infrastructures de transports, enfouissement des déchets… De nombreux secteurs seraient concernés.

Courrier de menace

Le quotidien évoque notamment cinq chantiers d’ampleur « susceptibles de donner lieu à une contestation violente » et qui seraient particulièrement surveillés par les renseignements. Sans surprise figure Bure (Meuse), dans le Marais poitevin, où se joue depuis des années une bataille contre le projet « Cigéo » d’enfouissement de déchets radioactifs porté par l’État et contesté par les associations environnementales. Selon les informations du Figaro, « un inquiétant courrier émanant de la mouvance antinucléaire » aurait même été envoyé en février dernier à un responsable du centre Meuse/Haute-Marne de l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra).

« L’enveloppe contenait une munition d’arme de guerre, de type AK-47 », a ainsi rapporté une source au quotidien, ajoutant que « les activistes ont revendiqué cette action dans un long article publié sur les réseaux sociaux ». Et de préciser : « Le texte faisait largement référence à Alfredo Cospito, militant antinucléaire italien, figure de la fédération anarchiste informelle et auteur de deux attentats, dont un visant le directeur d’une entreprise opérant dans le domaine nucléaire et qui a été blessé par balle à la jambe. »

Cette missive, qui dévoile notamment l’adresse personnelle de la victime, avec des photographies de son domicile, est par ailleurs signée par la mention « Groupes autonomes contre le nucléaire » – une référence à la mouvance d’extrême gauche née en mai 1968 qui évolue en dehors de tout parti ou syndicat et prône des formes d’action insurrectionnelle ou illégale.

« Le concept de ZAD n’est plus en vogue »

Toujours selon Le Figaro, les services de renseignements suivent aussi de près le chantier ferroviaire de la Ligne nouvelle du Sud-Ouest (LNSO), qui doit relier Bordeaux à Toulouse et à Dax. Le collectif écologiste radical des Soulèvements de la Terre, fondé en 2021, voudrait « imposer un freinage d’urgence » des travaux. Le préfet de Gironde vient de prendre des mesures, « comme l’interdiction du port et du transport d’objets pouvant constituer une arme dans 30 communes implantées dans le sud du département », relève le journal.

Autre chantier dans le collimateur des écologistes radicaux : la ligne électrique à très haute tension (THT), développé par RTE, reliant la France à l’Espagne via un tunnel en forme de boucle long de 27 kilomètres, avec notamment la présence d’un canyon sous-marin nécessitant de passer les câbles sur terre dans les Landes… Au grand dam des habitants, mais aussi des activistes qui ont occupé la forêt près de Hossegor en début d’année. Un dossier « potentiellement explosif » pour les autorités si la convergence des luttes opère, alors que plusieurs recours en justice ont été lancés pour mettre fin à ce projet.

« Si le concept de ZAD n’est plus en vogue, puisqu’officiellement nous ne comptabilisons que celle des Lentillères à Dijon et que les autres tentatives sont aujourd’hui fréquemment entravées, les militants de l’ultragauche et de l’écologie radicale restent actifs en adaptant les modes opératoires. Désormais, les actes de sabotages des outils, des machines et les tentatives de blocages des chantiers ont pris le dessus, avec un retour plus marqué à des actions clandestines menées à la nuit tombée », analyse dans les colonnes du Figaro le directeur national du renseignement territorial (RT) Bertrand Chamoulaud.

SLT et XR à la manœuvre

Et ce dernier d’ajouter : « La situation se dégrade lorsque les collectifs sont repris en main par des groupes plus structurés, qui versent volontiers dans la violence ». La DNRT observe que les militants des Soulèvements de la Terre ou encore ceux d’Extinction Rebellion (« XR ») sont « souvent à la manœuvre » dans les mobilisations contre ces chantiers rebaptisés « grands projets inutiles et imposés » par leurs opposants. D’après l’organisme, les deux organisations seraient impliquées dans 23 des 49 grands projets contestés, soit près de 50 % du total.

Selon Le Figaro, le renseignement territorial a identifié dix grands projets qui pourraient se « radicaliser » et « amener à une contestation plus virulente ». Parmi ces derniers, on peut noter le chantier de mines de lithium dans l’Allier, qui doit accueillir l’un des plus grands réservoirs en Europe d’« or blanc », ou encore celui du titanesque canal Seine-Nord-Europe, même si la récente découverte d’espèces protégées pourrait retarder ou modifier profondément les travaux.

Les renseignements classent aussi 17 autres sites en « contestations faibles », tels que les parcs photovoltaïques dans les Alpes-de-Haute-Provence et dans les Ardennes, où l’on note la présence des Soulèvements de la Terre. Enfin, ils gardent un œil sur 17 sites à la contestation jugé « en sommeil », comme sur le chantier controversé de l’autoroute A69 entre Toulouse et Castres, en attente d’une décision de justice après l’arrêt des travaux en février dernier à la suite d’une décision du tribunal administratif donnant gain de cause à ses opposants.

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Guerre au Soudan : comment les Émirats convoitent l’or et les terres agricoles

[pompé sur reporterre]

Depuis deux ans, le peuple soudanais subit les conséquences d’une guerre impitoyable entre l’armée régulière et un groupe paramilitaire. Dans l’ombre du conflit, les Émirats arabes unis lorgnent l’or et les terres arables.

Cela fait exactement deux ans que le Soudan, troisième plus grand pays d’Afrique, est ravagé par une guerre civile. Ce conflit, décrit comme « la crise humanitaire et de déplacement la plus dévastatrice au monde » par les Nations unies, oppose les Forces armées soudanaises (FAS), l’armée régulière commandée par Abdel Fattah al-Bourhane, et le groupe paramilitaire des Forces de soutien rapide (FSR), dirigé par Mohamed Hamdane Daglo, dit « Hemetti », un ancien chef de milice qui a opéré pendant la guerre du Darfour (2003-2020).

Les chiffres sont horrifiants : on compte 12 millions de déplacés et plus de 150 000 morts, d’après une estimation faite en 2024 par l’ancien envoyé spécial étasunien au Soudan Tom Perriello. Près de 25 millions de personnes, soit la moitié de la population, souffrent d’une insécurité alimentaire aiguë, dont 8,5 millions en situation d’urgence ou de famine, selon les Nations unies et le Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire (IPC).

Les mines et les terres au cœur du conflit

En janvier, les Forces de soutien rapide ont été accusées par les États-Unis de génocide contre la communauté Masalit, dans le Darfour, où leurs soldats ont « systématiquement tué des hommes et jeunes garçons et violé des femmes et jeunes femmes du fait de leur origine ethnique ».

Au cœur de cette guerre effroyable, les ressources naturelles du Soudan, en premier lieu son or et ses terres, suscitent l’intérêt d’acteurs puissants. Le pays, qui occupe une position stratégique sur la mer Rouge, est le troisième producteur d’or d’Afrique.

Actuellement, des mines sont exploitées dans les zones sous contrôle des FAS comme dans celles des FSR. Les bénéfices des ventes des deux groupes ennemis, qui avaient créé des sociétés de négoce d’or bien avant la guerre, leur permettent d’acheter des armes.

Ce commerce profite aussi aux acheteurs, et surtout aux Émirats arabes unis (EAU). Ces derniers sont connus pour être l’une des « principales plaques tournantes internationales du commerce » de ce métal précieux, et la première destination de l’or illégal africain, comme l’a montré l’ONG suisse SwissAid.

Les Émirats arabes unis sont obligés d’importer 90 % de leurs denrées alimentaires

Avant le déclenchement de la guerre, la quasi-totalité de la production du Soudan partait vers les EAU, un trajet qui semble toujours d’actualité. Une partie passe aussi en contrebande par d’autres États, dont l’Égypte, avant d’y arriver.

Les vastes terres arables et les produits agricoles du Soudan sont une autre source d’intérêt majeur dans cette guerre. Depuis le début des hostilités, les Forces de soutien rapide mènent de violentes campagnes qui déplacent les populations et s’emparent des terres.

Elles ont détruit de nombreux villages dans l’État de Gezira, la plus grande zone agricole irriguée du pays, pour convertir cette dernière en « gigantesques ranchs militarisés », a rapporté en 2024 dans le Guardian Nicholas Stockton, un ancien fonctionnaire des Nations unies. Le commerce du bétail vers les pays du Golfe est « redevenu la principale industrie d’exportation du Soudan » et « le principal moteur de la guerre », a-t-il dit.

Près d’un million d’hectares de terres sous contrôle

Dans ce secteur, les Émirats arabes unis, qui manquent de terres arables et doivent importer 90 % de leurs denrées alimentaires, sont en première ligne. Comme les autres pays du Golfe, ils sécurisent leurs approvisionnements depuis la crise alimentaire de 2008 en prenant le contrôle de grandes superficies de terres agricoles un peu partout dans le monde. L’organisation Grain a documenté leur « pouvoir croissant » dans « le système alimentaire mondial ».

Le Soudan occupe une place importante au sein de cet « empire logistique » que les Émirats sont en train de bâtir et « qui relie désormais environ un million d’hectares de terres agricoles acquises par les Émirats dans le monde entier à un réseau de ports et de plates-formes logistiques », souligne Grain.

Ainsi, avant la guerre, les EAU avaient conclu avec Khartoum un contrat de six milliards de dollars pour construire un port sur la côte soudanaise et misaient sur des investissements agricoles à grande échelle. Depuis plusieurs années déjà, de grosses entreprises émiraties contrôlent des dizaines de milliers d’hectares dans le pays.

Les chiffres traduisent bien l’importance que les ressources soudanaises représentent pour les EAU : en 2023, les principaux produits exportés par le Soudan vers les Émirats étaient l’or (1,03 milliard de dollars), des graines oléagineuses (15,9 millions de dollars) et des cultures fourragères (14,2 millions de dollars).

Les Émirats arabes unis, acteur incontournable

Pour protéger leurs intérêts, les EAU n’ont pas hésité à prendre parti lorsque la guerre a éclaté : ils ont choisi de soutenir les FSR de Hemetti, avec lesquelles ils étaient déjà en lien d’affaires, selon de nombreux spécialistes de la région et des enquêtes journalistiques. Ils les alimenteraient, entre autres, en armes, en violation d’une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies.

De l’avis de plusieurs experts, ce mécénat, que les Émirats nient cependant assurer, a été jusqu’ici décisif : sans lui, les FSR n’auraient pas pu tenir aussi longtemps face aux Forces armées du Soudan, comme l’ont expliqué des experts, dont le politologue Federico Donelli et le Centre d’études stratégiques de l’Afrique, qui dépend du département de la Défense des États-Unis.

« Des acteurs extérieurs ont soit activement encouragé les combats, soit fermé les yeux »

« L’horreur au Soudan montre de façon alarmante jusqu’où les Émirats arabes unis sont prêts à aller pour sécuriser leurs intérêts agricoles à l’étranger », constate Grain. Tout en fournissant des armes et un soutien logistique aux FSR, les Émirats prônent la paix et versent des centaines de millions de dollars pour financer l’aide humanitaire au Soudan. Alors que la guerre a détruit le système de production du pays, ils ont aussi organisé en 2024 un sommet mondial sur la sécurité alimentaire.

Le rôle déterminant des EAU fait dire à des experts que l’une des principales clés du conflit se trouve aujourd’hui du côté d’Abou Dabi. « On peut affirmer sans crainte que quiconque souhaite mettre fin aux combats au Soudan devra composer un numéro commençant par +971 [indicatif téléphonique des EAU], puisque toutes les routes menant à Hemetti passent inévitablement par les Émirats », estime Andreas Krieg, professeur assistant au King’s College à Londres.

Mais on sait aussi que l’Égypte et le Qatar, notamment, soutiennent de leur côté les FAS. Si la guerre et les massacres se prolongent, c’est en partie « parce que des acteurs extérieurs ont soit activement encouragé les combats, soit fermé les yeux », a analysé la chercheuse Leena Badri.

Les pays voisins menacés

L’Union européenne (UE) et les autres acteurs internationaux « n’ont pas su agir de manière significative pour protéger les civils attaqués », a déploré de son côté un collectif d’organisations dans une lettre adressée fin mars à la cheffe de la diplomatie de l’Union européenne et aux ministres des Affaires étrangères des pays membres de l’UE.

Lire aussi : Un groupe minier français détruit un désert unique au Sénégal

Pour l’instant, il n’y a aucune perspective de paix en vue. Fin mars, les troupes d’Abdel Fattah al-Bourhane, considéré par les Nations unies comme le dirigeant de facto du pays, ont repris l’entier contrôle de Karthoum, mais les FSR tiennent toujours une partie du sud du pays et presque tout le Darfour (ouest).

Désormais, les experts redoutent une propagation du conflit aux pays voisins, comme le Soudan du Sud et le Tchad, où la situation est déjà très fragile, voire explosive. Près de deux millions de Soudanais y sont réfugiés.

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PJL simplification : déréguler l’IA, accélérer sa fuite en avant écocide

[pompé sur laquadraturedunet]

Ce soir ou demain seront examinés les amendements à l’article 15 du projet de loi « simplification » de la vie économique. La Quadrature du Net, en lien avec le collectif Le Nuage était sous nos pieds et les membres de la coalition Hiatus, appelle à sa suppression, et avec beaucoup d’autres actrices et acteurs de la société civile ainsi que des représentant·es politiques, à l’instauration d’un moratoire sur les gros data centers. Participez à cette bataille en vous rendant sur notre page de campagne !

Que prévoit l’article 15 ?

L’article 15 du projet de loi, relatif aux centres de données, s’inscrit parfaitement dans cette sombre histoire : il autorise le gouvernement à octroyer aux projets de construction de très gros data centers, extrêmement impactants sur le plan environnemental, un statut issu de la loi de 2023 sur l’industrie verte : le label « projet d’intérêt national majeur » (PINM). D’après le gouvernement, ce statut pourra être octroyé aux data centers d’une surface comprise entre 30 et 50 hectares (soit jusqu’à 71 terrains de foot) !

Avec ce statut PINM, les multinationales de la tech et les fonds d’investissements qui les soutiennent se verraient assistés par le gouvernement pour imposer les data centers aux communes : l’État prendrait alors la main sur les compétences des collectivités locales relatives à l’urbanisme et à l’aménagement du territoire, en menant lui-même la réécriture des plans locaux d’urbanisme afin de les adapter aux projets concernés. Les procédures de consultation du public seraient encore allégées. Enfin, l’État pourrait accorder des dérogations aux réglementations environnementales, notamment celles relatives aux espèces protégées. En d’autres termes, l’État pourrait court-circuiter les règles existantes au nom de la « simplification » et « l’innovation » et imposer la construction de data centers polluants à des communes.

Déréguler la tech

La loi « simplification » marque donc une étape fondamentale dans la dérégulation de l’IA, le tout au service de l’industrie de la tech et dans le contexte d’une bulle spéculative autour des data centers et d’une rivalité géopolitique croissante entre les puissances impérialistes de ce monde.

Lors du sommet relatif à l’IA organisé par la France en février dernier, la couleur était clairement affichée. Dans son allocution, Emmanuel Macron affirmait : « Si on régule avant d’innover, on se coupera de l’innovation ». Le vice-président étasunien techno-réactionnaire JD Vance, qui avait fait le déplacement à Paris, n’avait pas caché sa satisfaction : « Je suis content de voir qu’un parfum de dérégulation se fait sentir dans nombre de discussions », avait-il déclaré lors de son allocution.

En réalité, dès 2023, la France avait fait des pieds et des mains au niveau de l’Union européenne pour faire primer la sacro-sainte « innovation » sur les droits humains, dans le cadre des négociations sur le règlement IA. Aiguillée par l’ancien ministre Cédric O devenu lobbyiste en chef de la tech française, et à force de coups de pressions voulus par Emmanuel Macron, Paris était parvenu à convaincre ses partenaires européens de privilégier une approche moins-disante. Ces renoncements se sont particulièrement fait sentir sur le front des IA policières, avec la légalisation de la reconnaissance faciale en temps réel et un certain nombre d’exceptions réservées aux forces de police et autres services de renseignement.

Dans le même temps, toujours au nom de l’IA, on multipliait les dispositifs dérogatoires au droit, par exemple via des mécanismes de « bacs-à-sable réglementaires ». Et c’est désormais le RGPD que certains aimeraient détricoter pour « libérer » les IA censément « entravées » par les règles adoptées pour protéger le droit à la vie privée et les données personnelles. Loin de défendre les « valeurs » associées aux droits humains, sociaux et environnementaux, l’Union européenne s’enfonce dans un suivisme mortifère face à la Chine et les États-Unis, deux puissances engagées dans une course à l’IA.

La technocratie en marche

Au nom de la « simplification », l’article 15 du projet de loi débattu par l’Assemblée nationale poursuit ce mouvement de dérégulation en rognant cette fois sur les législations environnementales et le droit à la participation des citoyens concernant les projets de gros centres de données.

Parmi ces derniers, se trouvent les immenses data centers soutenus par le gouvernement français. Dans la perspective de développer ces infrastructures, ossature du numérique dominant, et d’accélérer l’accaparement des terres, des ressources foncières, minières, hydriques et l’exploitation des travailleur·euses qu’elles impliquent, nous voyons aujourd’hui des entreprises comme RTE, normalement garantes du service public de l’énergie vanter leur collaboration avec les multinationales étasuniennes du secteur, comme Digital Realty. Le bilan prévisionnel de RTE prévoit ainsi un triplement de la consommation d’électricité des data centers d’ici à 2035, soit autour de 4% de la consommation nationale.

Du côté du gouvernement, on voit dans les milliards d’euros d’investissements privés annoncés dans les data centers construits en France la confirmation du bien-fondé de sa politique de relance du nucléaire, quitte à passer sous silence les dangers et les grandes inconnues qui entourent ces programmes. Quitte aussi à engager une relance débridée de l’extractivisme minier et des prédations qui y sont liées, comme y encourage l’article 19 de ce même projet de loi « simplification ». Quitte, enfin, à museler les contestations, à s’asseoir sur le droit à la consultation du public et à rogner encore un peu plus sur les compétences de la Commission nationale du débat public, qui depuis des années demande à être saisie lors de la construction des centres de données.

À la clé, c’est d’abord l’impossibilité d’une politique de sobriété collective pour faire face aux crises sociales, climatiques et écologiques. Avec l’augmentation de la demande liée aux data centers, c’est aussi la perspective d’une explosion des prix de l’électricité, la précarité énergétique qu’elle suppose et des risques décuplés de conflits d’usage. Car, à la mesure de leurs moyens financiers, l’appétit des géants de la tech en électricité est insatiable. Il y a quelques jours, Eric Schmidt, ancien PDG de Google et émissaire de la Silicon Valley à Washington, l’admettait sans détour devant une commission du Congrès étasunien au sujet du développement de l’IA :

« Ce que nous attendons de vous [le gouvernement], c’est que nous [la tech] ayons de l’énergie sous toutes ses formes, qu’elle soit renouvelable, non renouvelable, peu importe. Il faut qu’elle soit là, et qu’elle soit là rapidement. De nombreuses personnes prévoient que la demande pour notre industrie passera de 3 % à 99 % de la production totale [d’électricité au niveau mondial] (…) ».

Aux États-Unis, de nombreux producteurs d’électricité s’apprêtent ainsi à rallumer des centrales à gaz ou au charbon, ou à retarder leur fermeture face à la consommation croissante des data centers. Technofascisme et carbofascisme vont indéniablement de pair.

Contre cette fuite en avant, il faut voter contre l’article 15 du projet de loi, et soutenir un moratoire sur les gros data centers, le temps que les conditions d’une maîtrise collective des infrastructures numériques puissent être posées. La balle est désormais dans le camp des parlementaires. Retrouvez notre pour contacter vos représentant·es à l’Assemblée et peser sur leur vote !

 

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